Le jardin-collection est de nouveau ouvert au public du lundi au vendredi !
L’équipe administrative du FRAC RÉUNION vous reçoit sur rendez-vous uniquement.
Merci !
Le Tout Petit Cabinet, Maison Dussac
Du 2 novembre au 1er décembre 2019
mercredi, jeudi, samedi et dimanche
de 14h à 18h
Sur rendez-vous pour groupes et scolaires
Après Mary Sibande et Roberto Stephenson, le POP’UP du mois de novembre est consacré à Gabrielle Manglou.
Le FRAC RÉUNION l’installe dans le Tout Petit Cabinet.
Archéologies rapides
“En 2018, au département Archéologie de la DAC OI, j’ai fait des photographies de tessons de vaisselles de Bordeaux ou de Chine, de morceaux de pipes à tabacs, de clous rouillés, de bouton de verre, et autres fragments protégés par des sacs en plastique numérotés au marqueur.
Je reste encore une fois devant ce questionnement inévitable, redondant, sur cette idée de plis temporels secrets, indomptés et indomptables ; cette frise temporelle qui serait graduée par des événements ou objets qui ne disent pas tout ou pas grand-chose.
Je pense immédiatement à ces murs d’aujourd’hui dans lesquels on fige des morceaux de verre et de poterie pour se protéger et éloigner les voleurs. Je ressens une similitude poétique dans cette agencement hasardeux.
Avec cette série Archéologie rapide, je m’attribue une sorte de terrain, périmètre archéologique en créant des artefacts. Je m’approprie par mimétique le plaisir de la trouvaille archéologique, de la chasse au trésor.
Archéologie rapide est issue d’Hypothèse de l’objet en creux, projet mené depuis début 2017.
Peu d’objets matérialisent l’Histoire de La Réunion. L’archéologie sur l’île, en est à son balbutiement.
L’histoire de la Réunion se pose en creux. Ses creux sont remplis par des espaces imaginaires dans lesquels s’engouffrent des fantasmes. Nous logeons notre passé dans la lignée de telle ou telle catégorie d’êtres vivants arrivés sur l’île dans telle ou telle condition. Ces sensations impalpables définissent peu à peu notre réalité. Réalité floue, sans contour vérifié, sans nette précision, réalité rêvée. Notre Histoire surfe sur une ligne a-chronologique et immatérielle. L’imaginaire qui en découle s’engouffre dans la complexité de la juxtaposition decivilisations diverses (Afrique, Chine, Europe, Inde, Madagascar…) parfois contradictoires dans leurs logiques de pensée. Comme le dit l’auteur Jean-Luc Raharimanana : «Nos mémoires sont multidirectionnelles».
Depuis mes recherches sur le naufrage de L’Utile sur l’île de Tromelin et la découverte d’instruments de cuisine ou de vaisselles fabriqués avec ingéniosité par les esclaves échoués, je suis fortement intriguée par la présence timide d’objets usuels du passé réunionnais : objets du quotidien, décoratifs rituels, cultuels, divinatoires, magiques, nomades… Où sont ces objets ? Sont- ils cachés quelque part ? Ont-ils été détruits par l’usure ? Sont-ils sous estimés ou oubliés ?
En dehors du fait d’être passionnée par l’idée de la représentation, par l’image en général, sa force, son imprégnation, l’objet me questionne particulièrement. Il découle directement d’une nécessité qui allie le fonctionnel, le pratique et souvent l’esthétique. Avec lui résonnent le contexte, l’époque, les moyens.
Ce qui m’importe ici, ce n’est pas de rétablir une vérité ou de remplacer le mobilier, les ustensiles, les outils, les bibelots, mais de poser la question de leur absence et de l’espace-temps dans lequel se trouve leur immatérialité. Autrement dit, quels seraient les frontières ou les échos entre l’immatériel, le virtuel, l’absence, l’invisible, l’inexistant, l’oubli, la négation, le fantasme, le souvenir, l’hypothèse, le secret, la projection, le mensonge, la mort, la confusion.